Lors de cette 4e édition du Congrès des Écrivains de la Caraïbe qui a eu lieu du 15 au 18 avril 2015 en Guadeloupe avec pour thème “Voyages, migrations, diasporas dans les littératures caribéennes”, l’écrivain et médecin psychiatre haïtien, Joël des Rosiers, a présenté son analyse des problématiques de la déterritorialisation à partir du terme “métaspora”.
Joël des Rosiers s’appuie sur son oeuvre intitulée “Métaspora : essais sur les Patries intimes”, publié à Montréal (Canada) en 2013 aux Éditions Tryptique, pour livrer sa vision de la déterritorialisation. L’auteur haïtien qui a connu l’exil avec ses parents lors de la dictature duvaliériste souligne que les victimes furent nombreuses et que sa terre natale a été traversée par l’indigénisme, l’antillanité, la créolité. Selon lui, la poésie devient alors “un acte de résistance, un contre-pouvoir”, d’où le terme “métaspora”, “spora” signifiant “résistance” et “méta”, étant “après”, “au-delà”.
Pour expliquer ce phénomène de “déterritorialisation”, il s’est penché sur les nouvelles techniques de l’information et de la communication (NTIC) qui créent une “communauté virtuelle, ennemie des nations” et une surveillance des citoyens qui deviennent ainsi des “ennemis intérieurs à l’instar des 250 000 Haïtiens dénationalisés en République Dominicaine”, explique Joël des Rosiers qui est engagé dans la défense des droits de l’Homme et des “sans-papiers”.
L’auteur haïtien analyse également le mot “diaspora” ayant le sens de “dispersion” et de “châtiment”, jadis limité aux Hébreux avant d’être utilisé dans les sciences sociales. Si Joël des Rosiers admet que la diaspora convient parfaitement au monde actuel, il regrette cependant qu’il soit débarrassé du “châtiment”. Il évoque alors l’interdiction faite aux esclaves africains de maintenir des liens familiaux sur les plantations ce qui illustrait la violence du maître. Il déclare que les captifs n’avaient rien – ni écriture, ni capitale – pour construire (les Nègres n’ont pas de Sion) mais ils avaient une mémoire. Le poète haïtien qui est aussi médecin voit en l’exil “une rupture traumatique”. “Je plaide pour une fabrique de patries intimes, anti-origines, impalpables qui ne peut être interdite par aucune autorité (…) Je pense en poète, j’écris en poète donc librement (…) Je pars d’une absence. Le poète ne considère pas le mot comme un signe, il est d’abord une sonorité. Le poète cherche à produire une contestation à l’intérieur du sens”, affirme-t-il.