Du 10 au 28 février, l’association “KérArt” a présenté son exposition collective intitulée “Zyé Ouvè asi Manten” à la Médiathèque du Lamentin. Il s’agissait de mettre en valeur le patrimoine de cette commune de la Guadeloupe par le biais notamment de la peinture figurative.
Dix artistes peintres et plasticiens – Jimmy Cétout, Françoise Charol, Claude Chovino, Céline Funfrock, Chimène Girard, Jean-Louis Halley, Florence Le Quellec, Rose-Marie Pascotto, Monique Rinaldo et Maurice Vital – ont participé à cette exposition intitulée “Zyé Ouvè asi Manten” (Regard sur Le Lamentin). Tous devaient présenter des oeuvres en relation avec cette commune du Nord de la Basse-Terre et ils ont été très inspirés par son histoire, son économie, son habitat, sa faune et sa flore, sa culture ou encore sa vie politique…
Alors, les visiteurs ont pu admirer des tableaux représentant, entre autres : des lamantins (mammifères qui n’existent plus aujourd’hui dans nos eaux mais qui ont donné leur nom à la commune et que le Parc National de la Guadeloupe tente de réintroduire dans l’île) ; les vestiges de l’usine sucrière Grosse Montagne qui a fermé définitivement ses portes en 1994 après des grèves longues d’ouvriers agricoles ; le Père Chérubin Céleste qui a lutté aux côtés de ces ouvriers de la canne notamment par une grève de la faim en 1975 ; la récolte de la canne à sucre avec ces ouvriers agricoles car, malgré la fermeture de la sucrerie Grosse Montagne, Le Lamentin demeure une terre agricole ; des petites maisons créoles ; la mairie et l’église ; l’actuel maire Jocelyn Sapotille et l’ancien maire José Toribio ; des oeuvres d’art installées sur le territoire car Le Lamentin a été une commune pionnière au niveau artistique en Guadeloupe avec, par exemple, son École d’Arts Plastiques dirigée par le célèbre plasticien, Michel Rovélas, dans les années 1990.
Le patrimoine du Lamentin à l’honneur
Avant d’arriver au Lamentin, l’association “KérArt” avait déjà organisé trois éditions de cette manifestation artistique à savoir, à Pointe-à-Pitre (Zyè Ouvè asi LaPwent, décembre 2012), au Gosier (Zyé Ouvè asi Gozié, mars 2015) et à Baie-Mahault (Zyé Ouvè asi Bémao, mai 2016).
“À travers cette série d’expositions, l’association KérArt qui regroupe une dizaine de peintres et de plasticiens veut mettre en lumière le patrimoine d’une commune en Guadeloupe. Les démarches peuvent être assez longues pour obtenir l’accord officiel des municipalités et c’est la raison pour laquelle, l’exposition “Zyé Ouvè asi…” a lieu en moyenne tous les deux ou trois ans”, explique Jean-Louis Halley, le président de l’association. Ce dernier, qui est enseignant au Lycée Agricole, a commencé à peindre d’abord chez lui puis, il s’est inscrit aux cours dispensés par le grand peintre haïtien, Maurice Vital, à l’Office Municipal de la Culture et du Sport (OMCS) du Gosier. “Maurice m’a mis le pied à l’étrier. Je lui ai apporté quelques-unes de mes toiles et quand il les a vues, il m’a dit qu’il n’avait rien à m’apprendre et que j’avais “le truc”, ce sont ses propres mots. Je suis quand même resté avec Maurice pendant quatre ans puis j’ai poursuivi ma formation avec la peintre Catherine Pugliesi Conti pendant trois ans (…) J’ai commencé à montrer mon travail lors d’expositions collectives comme “Lectures de Peintres”, se souvient-il. “Je lui ai dit qu’il fallait juste développer le “truc”, alors il est resté à mes cours après il est parti car un artiste a besoin de se construire”, précise Maurice Vital.
La peinture figurative à l’honneur
Ce “monument” de la peinture haïtienne a choisi de vivre en Guadeloupe depuis 1991 après un premier séjour entre 1976 et 1978 et un deuxième séjour entre 1986 et 1989 suite à sa participation avec la délégation d’Haïti au “Festival des Arts de la Guadeloupe” (FESTAG), un grand événement artistique caribéen qui, malheureusement, n’existe plus…
“À travers ce concept, “KérArt”, souhaite également mettre en valeur les artistes s’exprimant par le biais de la peinture figurative. En Guadeloupe, nous avons peur de nous représenter alors les peintres de l’art figuratif ne sont pas bien considérés. La jeune génération préfère la peinture abstraite”, déclare Jean-Louis Halley qui a aussi peint le portrait de son ancêtre venu d’Inde. Il est vrai que, de nos jours, ce style artistique qui représente la réalité n’est pas très exploité par nos peintres… “Cependant, chaque société a besoin de se représenter. Au cours des siècles, il y a d’abord eu le style figuratif avec, par exemple, les portraits et même les grands peintres de la peinture abstraite, comme Picasso, ont d’abord étudié le dessin et ils maîtrisaient la peinture figurative”, ajoute Maurice Vital qui considère sa présence en Guadeloupe comme une “mission” afin de transmettre aux jeunes ses connaissances. “D’ailleurs, dans chaque exposition que nous organisons, je tiens à ce qu’il y ait des visites d’écoliers”, dit-il.
Les peintres et plasticiens de “KérArt” devraient consacrer leur prochain “Zyé Ouvé asi…” à la capitale de la Guadeloupe, Basse-Terre. Par ailleurs, l’association aimerait tisser des liens étroits avec des artistes caribéens et participer à des expositions en Martinique, Haïti, à Cuba etc.